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L'Europe doit-elle accueillir les migrants ?

Publié le 13 Septembre 2015

I. La persistance de logiques nationales dans l’appréciation d’un phénomène d’ampleur européenne

 

I.1. Des interventions étrangères à l’origine de la déstabilisation des pays d’origine des migrants

 

La mise à exécution du plan américain dit du Grand Moyen-Orient a entrainé, à partir de la fin des années 90, un interventionnisme accru dont la première action a été la guerre d’Irak en 2003. L’idée de ce plan était, à partir de la chute de Saddam Hussein et de la démocratisation du pays, d’initier une dynamique démocratique régionale par un effet de dominos qui entraînerait l’ensemble des pays arabes sur la voie de l’émancipation politique. Alors que l’évolution du conflit irakien et l’enlisement américain dans ce pays avait semblé signé l’échec de ce plan, les Etats-Unis ont vu dans la révolte tunisienne de 2010 une formidable aubaine pour remettre à l’ordre du jour cette stratégie mais en l’adaptant aux nouvelles circonstances. L’intervention militaire directe était dorénavant non seulement proscrite mais superflue. Il leur suffisait de souffler intelligemment sur les braises des révoltes populaires arabes et d’utiliser ces révoltes comme effet de levier pour renverser les pouvoirs en place. En Egypte, pays où l’influence américaine est historiquement forte, on exhiba un certain Wael Ghoneim, cadre chez Google expatrié à Dubaï qui enflamma les réseaux sociaux en appelant au renversement de Moubarak. Parallèlement, les nombreuses associations de droits de l’homme présentes en Egypte et financés par les Etats-Unis ont joué un rôle non négligeable dans la manipulation du mouvement populaire. Et Moubarak tomba. Dans les pays où l’influence américaine est faible ou inexistante, les révoltes mimétiques ne purent s’appuyer sur ces vecteurs si bien que les secousses populaires, pourtant puissantes, ne furent pas suffisantes pour provoquer par elle-même la chute des régimes.

 

En Libye, les Etats-Unis eurent la divine surprise, réelle ou feinte, de voir la France de Nicolas Sarkozy proposer, en bon vassal, de donner un coup de main exogène au plan américain. L’asservissement de Nicolas Sarkozy aux vues américaines était telle que même la Grande-Bretagne, pourtant habituée depuis 1945, à la première place du podium aux olympiades de la servilité à l’Oncle Sam, se trouva cette fois surclassée sur son propre terrain, contrainte d’emboiter le pas à la France pour faire bonne figure. Cette intervention libyenne fut conduite sous mandat des Nations-unies, les Occidentaux ayant littéralement arnaqué russes et chinois, leur expliquant que la résolution ne prévoyait qu’une protection aérienne et non des attaques. C’est cette mystification qui a conduit ensuite la Russie et la Chine à systématiquement opposer leurs vétos respectifs sur la Syrie.

 

Irak, Syrie, Egypte, Libye sans parler du Yémen autant de pays qui fournissent aujourd’hui les plus gros contingents de réfugiés vers l’Europe. Pour ceux qui douteraient du lien entre ces déstabilisations extérieures de pays souverains et la problématique migratoire, l’exemple de l’Egypte est éclairant. Une fois le pays repris en main et stabilisé par le maréchal Al Sissi, le flux de réfugiés en provenance de ce pays, massif entre 2011 et 2014, s’est aujourd’hui quasiment asséché.

 

C’est donc bien l’intrusion calculée, planifiée par des puissances étrangères, au sein de pays arabes souverains qui a ouvert les vannes du phénomène migratoire auquel nous assistons aujourd’hui. Il faut ajouter que les points de départ de ces réfugiés vers l’Europe sont la Libye et la Turquie, deux pays musulmans dont le premier est tenu par des factions islamisto-mafieuses et le second s’est vu refusé l’entrée au sein de l’UE à plusieurs reprises. Autant dire que, pour des raisons différentes, ces deux pays, ont un intérêt à tenter à leur tour de déstabiliser l’Europe, sinon en lançant les vagues migratoires sur le Vieux continent, du moins en ne faisant rien pour les empêcher.

 

Aujourd’hui, d’après le renseignement militaire français, c’est près d’un million de migrants qui attendent dans la seule Libye de pouvoir s’embarquer vers l’Europe…

I.2. Face à cette immigration massive, les pays de l’Union européenne apprécient la situation sous un angle national

 

L’Allemagne est dans une situation de dépression démographique de longue période. Depuis plus de 20 ans, le taux de fécondité allemand atteint péniblement les 1,2 enfant par femme, soit presque deux fois moins que le nombre d’enfants par femme requis pour assurer le renouvellement des générations (2,1). Dans les années 90, l’intégration de l’Allemagne de l’Est et l’« émigration intérieure » consécutive a permis de masquer un temps cette tendance et a même offert le luxe au chancelier Schröder de mettre en œuvre les réformes de 2002 dont la pierre angulaire était une déflation salariale compensée par une hausse de la TVA (ce que l’on a pompeusement baptisé « TVA sociale » en France plus tard). Economiquement, la dépression salariale des années 2000 a dopé la compétitivité des produits allemands et permis d’accumuler sur le dos des partenaires européens (grâce à l’euro qui leur permettrait de s’endetter à très faible coût) des excédents commerciaux records.

 

Ce mécanisme vertueux pour l’Allemagne commence à s’enrayer : depuis quelques années, l’effet réunification a disparu et l’Allemagne se trouve à nouveau confronté au vieillissement accéléré de sa population. Les travailleurs commencent à manquer dans les usines et la main-d’œuvre disponible accepte de plus en plus difficilement de travailler au rabais. Depuis 2012, le salaire moyen allemand a progressé de 7%. Pour l’instant, cette hausse a été stérilisée par l’effet qualitatif du « made in Germany » qui veut que la demande (notamment étrangère) en produits allemands est inélastique aux prix. Mais ce label ne pourra pas indéfiniment protéger l’industrie allemande contre une baisse de la demande pour ses produits, si la hausse des prix venait à se poursuivre ou à s’amplifier. Or la dépression démographique allemande alimente la rareté du facteur travail et contribue donc à renchérir ce dernier sur le long terme. Cette dynamique infernale ne peut être stoppée que de deux manières :

  • soit en relançant la démographie (processus long dont les effets ne peuvent être ressentis que dans plusieurs années voire dizaines d’années) ;
  • soit, instantanément par un choc démographie exogène, autrement dit une immigration massive, susceptible de pallier l’insuffisance du facteur travail.

 

Les surplus commerciaux colossaux accumulés par l’Allemagne au cours de ces 20 dernières années permettent par ailleurs au pays de pouvoir financer l’accueil de cette immigration massive. Le taux de chômage très bas (moins de 5% de la population active, conséquence de cette rareté du travail) permet également au marché du travail allemand d’absorber sans difficultés un surplus de travailleurs. Ainsi quand Angela Merkel se dit prête à accueillir 800.000 migrants pour la seule année 2015, il ne faut pas y voir un simple effet de compassion émotionnelle. L’Allemagne a un intérêt économique vital à accueillir le surcroît de population lui permettant de compenser immédiatement ses propres insuffisances en la matière.

 

Peu ou prou, les autres pays du Nord de l’Europe, en particulier les pays scandinaves sont dans la même configuration démographique et donc économique que l’Allemagne. Cela explique pourquoi ces pays sont également devenus des eldorados pour les migrants.

 

La France et avec elle l’ensemble des pays du Sud de l’Europe, est dans une situation exactement inverse de celle de l’Allemagne. Depuis près de 15 ans, le taux de fécondité français est près du double de celui de l’Allemagne, soit 2,1 enfants par femme ce qui signifie que la France assure le renouvellement de ses générations. La France pâtit parallèlement du phénomène de « déficits jumeaux » conjuguant un déficit (et une dette publique) élevé avec un déficit commercial chronique. Les comptes sociaux sont lourdement déficitaires et ce depuis des années. La France vit un chômage de masse depuis 30 ans, un taux de pauvreté préoccupant, une insuffisance de logements sociaux ainsi qu’une crise de l’école publique. Les mécanismes mis en place pour aider les immigrés, même clandestins, sont supportables financièrement tant qu’ils ne concernent qu’un faible nombre d’ayant droits. La hausse de l’immigration clandestine ces dernières années s’est traduit par exemple par un doublement de l’Aide Médicale d’Etat (AME, dispositif qui permet la gratuité des soins aux clandestins) dont le budget avoisine désormais les 2 Mds EUR. Ainsi si la faiblesse démographique allemande a entrainé un tarissement du flux endogène d’arrivées sur le marché du travail permettant à l’Allemagne d’atteindre aujourd’hui le plein emploi, tel n’est pas le cas en France où le flux d’entrées sur le marché du travail reste soutenu depuis des années (alimenté par une démographie dynamique) dans une économie où le rythme de destruction d’emplois reste supérieur à celui des créations. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’en France toutes les prévisions structurelles sur une disparition « naturelle » du problème du chômage avec les départs à la retraite massifs des baby-boomers à partir de 2005-2010 ne se sont pas avérées.

 

Enfin, la situation particulièrement alarmante des comptes publics français ne permet pas non plus de prendre en charge de nouvelles charges liées à l’immigration, même si l’on admet que celles-ci ne seront que temporaires (ce qui reste à démontrer). Les pays du sud de l’Europe sont dans une situation proche de celle de la France (à l’exception de la démographie).

 

Il ne s’agit pas de fermer son cœur aux misères du monde mais la mission d’un responsable politique est de composer entre la nécessaire solidarité mondiale et les intérêts de son propre pays.

II. L’aplatissement de la France aux intérêts allemands

 

Ce décalage important des situations démographiques et économiques des pays au sein de l’Union européenne rend la question de la répartition des immigrés par un mécanisme de quotas totalement absurde. Calibré pour les intérêts des uns, il est totalement contreproductif pour les autres.

II.1. L’Allemagne à la manœuvre pour imposer ses intérêts

 

A la lueur de la description des faits, il apparaît que derrière les propos avenant autour de la solidarité européenne, se cache en fait une tentative de l’Allemagne d’imposer ses propres intérêts à l’ensemble des pays membres de l’UE afin d’alléger notamment son fardeau financier. La logique à l’œuvre est la même que celle qui a prévalu pour la réunification allemande. La clé de répartition des migrants imposée par l’Allemagne peut être comparé, dans le domaine monétaire, à l’envolée des taux d’intérêt sur le Deutsch mark dans un contexte d’ancrage du Franc français au mark au début des années 90.

 

A l’époque, la France fut dans l’obligation de suivre cette hausse des taux pour garder le lien fixe entre le FF et le DM, alors même que sa situation économique ne le nécessitait pas. Cet asservissement des élites françaises à l’intérêt allemand, sous prétexte de solidarité européenne, avait alors entraîné la faillite de près de 300.000 entreprises françaises en 1993, année qui fut celle de la plus grave récession économique depuis la fin de la Seconde guerre mondiale. N’ayant rien appris des leçons du passé, nos dirigeants se préparent à suivre l’Allemagne sur ses propres intérêts, démographiques cette fois, tout en croyant sacrifier les nôtres sur l’autel de la solidarité européenne.

 

En effet et d’un strict point de vue économique (le seul qui vaille vraiment dans notre époque tourmentée…), l’arrivée en Allemagne de centaines de milliers de migrants permet à ce pays non seulement de combler immédiatement son déficit démographique mais également de provoquer un choc d’offre sur le marché du travail. A demande de facteur de travail constante de la part des entreprises, répond une offre de travail désormais plus importante permettant de pourvoir les emplois vacants et, si on maintient cette dynamique, de peser fortement à la baisse des salaires. Ce dernier effet est salutaire car l’effet migratoire interne provoqué par la réunification s’est totalement tari et la faiblesse chronique de la démographie se traduit par une pression tendancielle à la hausse sur les salaires. Si celle-ci devait se concrétiser, ce serait tout le modèle allemand construit autour du dumping salarial sous Schröder qui serait menacé. Cela explique pourquoi le patronat allemand pèse de tout son poids pour que A. Merkel ouvre grande les frontières et accueillent le maximum d’immigrés. Paradoxalement, les mesures allemandes, exclusivement dictées par les besoins économiques, suffisent à elles seules à conclure que les réfugiés sont majoritairement économiques et non politiques.

II.2. La crise comme révélatrice de la persistance des nations européennes et de leurs intérêts

 

Plus généralement, ce qui est mise en cause ici c’est l’accord de Schengen, qui garantit une libre circulation des hommes entre les pays l’ayant ratifié. Schengen apparaît comme l’euro de la politique migratoire : c’est l’instrument de la politique migratoire européenne comme l’euro est l’instrument de la politique monétaire. Lorsque l’euro a été mis en place, à l’orée des années 2000, ses thuriféraires n’ont cessé de s’extasier devant son efficacité à protéger l’économie des pays membres de la zone euro. Entre 2002 et 2009 tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes. Tant que l’océan était calme, l’amarrage de 27 bateaux entre eux permettait à cette grosse embarcation battant pavillon euro d’évoluer rapidement et sans à-coups. Mais dès que le tsunami financier mondial des subprimes frappa, la houle menaça de fracasser la zone euro. Les intérêts nationaux sont réapparus au grand jour (si tant est qu’ils n’aient jamais disparu) et la zone ne fut sauvée que parce que l’Allemagne a réussi à imposer, une fois encore, ses propres intérêts à l’ensemble de ses partenaires. L’Allemagne a certes payé, pour des pays comme la Grèce notamment, mais les sommes restent tout à fait dérisoires par rapport aux milliers de milliards d’euros d’excédents amassés par le pays grâce à l’euro et à son dumping social.

 

Pour Schengen, on assiste à la répétition du même scénario mais dans un autre domaine. Schengen était un système optimal permettant de mutualiser les coûts et les démarches consulaires tout en donnant corps à un continuum géographique européen, rêve des fédéralistes depuis la nuit des temps. Tant que la mer était calme, cette foi encore, les Européistes ne tarissaient pas d’éloges sur Schengen. Jusqu’au moment où un choc exogène comparable à la crise financière frappa : la déstabilisation majeure des pays du sud de la Méditerranée et la déferlante migratoire sans précédent qui vient percuter l’Europe depuis plusieurs mois. Comme pour le psychodrame européenne autour de l’explosion de la zone euro suite au problème grec, l’Allemagne a fait tremblé les dirigeants européens en menaçant de mettre fin aux accords de Schengen. Et une fois de plus, le chantage a marché et l’Allemagne a imposé son diktat migratoire à ses partenaires. Ainsi en est-il de tous les outils supranationaux européens : tant que tout va bien, leur vice de construction est invisible. Mais que vienne la tempête et l’outil devient dangereux pour tous les Etats sauf pour celui à l’instigation duquel l’outil a été créé qui se trouve être aussi celui qui en bénéficie le plus. La politique de défense européenne, encore en gestation, offre d’ores et déjà un autre exemple emblématique.

II.3. Le danger d’une appréciation de la situation à travers l’unique prisme économique

 

Même pour l’Allemagne, l’intérêt migratoire peut être sujet à caution. En effet, les migrants relèvent de l’intérêt supérieur de l’Allemagne mais uniquement pour des raisons économiques. Le raisonnement qui prévaut ici relève de l’économisme le plus autiste, basé qu’il est sur l’hypothèse, bien connue des néo-libéraux, dite de l’individualisme méthodologique. Les individus, consommateurs ou producteurs, sont des homos œconomicus rationnels et interchangeables. Toutes les différences spatio-temporelles, culturelles, linguistiques, religieuses, etc. sont purement et simplement évacuées. Il manque un travailleur allemand ? Qu’à cela ne tienne : on le remplace par un migrant syrien qu’on aura au préalable sommairement formé… Ce décalage entre l’économique et le social au sens large explique pourquoi lorsque le patronat allemand milite pour ouvrir grandes les frontières, la population elle est beaucoup plus réservée quand elle n’est pas hostile. En France, politiques, intellectuels et grands patrons sont vent debout pour l’accueil du maximum d’immigrés quand 55% des Français y sont hostiles.

 

Les migrants sont majoritairement de culture arabe et de religion musulmane et ils arrivent en Europe pour s’y installer définitivement. Ils ne peuvent donc être considérés comme réfugiés car même si leurs pays respectifs venaient à se stabiliser à nouveau il n’y a pas de chance de les voir y retourner. C’est donc bien une immigration d’installation ou de peuplement. Or les pays de l’Union européenne sont depuis des années en proie à des difficultés majeures d’intégration de ces populations. Dès lors et alors que nous ne parvenons pas à intégrer les étrangers au bout de la deuxième voire de la troisième génération, est-il vraiment raisonnable d’en faire rentrer massivement d’autres au risque d’éloigner à tout jamais toute perspective d’intégration pour les uns et les autres ?

 

L’Allemagne, dont les médias ne tarissaient pas d’éloges quant à la générosité de ses dirigeants comme de sa population, vient d’ailleurs de faire une spectaculaire volte-face, le ministre allemand annonçant le 13 septembre 2015 au soir qu’il fermait ses frontières avec l’Autriche et qu’il réintroduisait « temporairement » un contrôle généralisé à ses frontières. Il est manifeste que plusieurs éléments importants l’ont poussé en ce sens : un accueil tellement massif qu’il devenait potentiellement hors de contrôle, des comportements violents et choquants de plusieurs centaines de migrants non rapportés dans les médias mais alimentant dans la population allemand une hostilité croissante, elle aussi cachée aux yeux de l’opinion… Que va faire la France face à ce changement de cap à 180° ? Il est fort probable que le gouvernement va très vite se retrouver dans une posture aussi inconfortable que celle qui fut la sienne au lendemain de la volte-face américaine dans l’affaire syrienne. Le franchissement de la fameuse « ligne rouge » (l’usage d’armes chimiques par le régime syrien) a donné la quasi certitude à la France que les Etats-Unis interviendraient militairement et entraîné donc cette dernière dans une gradation rhétorique guerrière annonçant l’imminence d’une intervention. Lorsque les Etats-Unis se rebiffèrent, la France, n’ayant pas les moyens d’y aller seule, comprit, mais un peu tard, qu’elle était allée trop loin dans le suivisme et l’alignement et fut durablement ridiculisée …

II.4. L’Histoire revisitée au profit du présent

 

Sans même évoquer les velléités de manipulation des opinions européennes avec la photo de ce petit garçon mort sur une plage turque, dont l’histoire exacte reste sujette à caution, on sent bien à travers la saturation d’images et d’articles, toute la machinerie de propagande médiatico-politique dont le but est de tenter de tordre une opinion structurellement hostile à toute immigration supplémentaire. Le décalage entre les élites et les peuples est là encore criant. La presse, les intellectuels et les politiques, notamment de gauche, y sont allés de comparaisons aussi douteuses les unes que les autres. Certains ont comparé les migrants aux Français, Belges et Hollandais fuyant les armées allemandes au cours de la débâcle de 1940 ; d’autres les comparent aux Juifs fuyant les Nazis, aux Arméniens accueillis en France suite au génocide de 1915. Ces rapprochements historiques choquants, dont le seul objectif est de jouer sur l’émotion en rappelant des événements ayant déchiré la conscience européenne, n’ont en réalité que des visées politiques : faire adhérer des peuples réticents aux vues d’élites coupées des réalités. S’ajoutent à cela des considérations expiatoires particulièrement prégnantes : les Allemands sont coupables de la guerre et des exterminations, les Français de Vichy et de la collaboration. Il faut donc se racheter une virginité historique en faisant aujourd’hui ce qu’on n’a pas fait hier. Expier, expier et expier encore. La détestation de soi comme condition préalable à l’amour du prochain et la repentance éternelle comme moyen de regagner le salut !

 

On oublie toutefois de rappeler que dans ces épisodes historiques tragiques, il s’agissait de populations européennes, de tradition judéo-chrétienne et non d’immigration en provenance d’autres continents…

 

Il est à cet égard éclairant qu’aucun autre pays, aucun autre bloc géographique n’a exprimé la moindre velléité d’accueillir des migrants. Par là même, il y a tout lieu de croire que si les migrants se dirigent exclusivement vers l’Europe c’est qu’ils savent qu’ils y seront reçus par des madeleines ayant mauvaise conscience et susceptibles d’être aisément roulées dans la farine. Il est en effet légitime de se poser la question de savoir pourquoi des migrants arabes et musulmans ne se dirigent pas prioritairement vers des pays géographiquement, culturellement et religieusement plus proches ? Qui plus est quand ces pays, ceux du Golfe pour ne pas les citer, ont largement les moyens de financer leur accueil ? Où est donc passé le discours sur l’islam religion de paix, de partage et de compassion, hululé à qui voulait l’entendre par nos élites au lendemain des attentats qui ont ensanglanté notre pays et que rien de concret n’est venu corroborer ?

 

Par ailleurs, d’autres conflits sont en cours et bien plus proches de nous, nous envoyant des images encore plus insupportables que personne ne veut pourtant montrer, à l’instar de l’Ukraine et des massacres de populations russophones à l’œuvre dans un silence assourdissant. La différence de traitement entre ces deux conflits montre à elle seule que ce n’est point exclusivement la solidarité qui est la veine jugulaire de l’emballement médiatique mais que celui-ci a des ressorts politiques indéniables.

II.5. Que doit faire la France ?

 

Margaret Thatcher avait l’habitude de dire que si le bon Samaritain avait pu aider son prochain laissé pour mort sur le bord de la route par des bandits, c’est qu’il en avait les moyens. Elle rejoint en cela un des vieux principes que l’on trouve dans toutes les religions monothéistes : ce qui est indispensable pour sa propre maison devient inaliénable au profit du culte. Ainsi, la France ne peut plus accueillir davantage d’immigrés, à supposer même qu’elle le veuille. La saturation en la matière est partout visible et d’autant qu’elle se double de difficultés d’intégration colossales. Des territoires entiers en France ont changé de visage s’étant totalement vidés de leurs populations françaises d’origine. Dans les écoles, des milliers de classe comprennent une écrasante majorité d’enfants étrangers dont les parents sont non francophones et qui ne le sont pas eux-mêmes. Face à cela, les enseignants ne peuvent évidemment pas dérouler normalement le programme, lésant ainsi les enfants français scolarisés dans ces classes qui doivent donc s’aligner vers le bas.

 

La France n’a plus les moyens de loger, d’employer, d’éduquer un nouveau flux de migrants et les Français, quelques soient leurs origines, n’en ont tout simplement pas envie. C’est leur droit. Les élites qualifient cela de racisme et d’intolérance. Mais pourquoi n’utilisent pas ces mots pour qualifier l’attitude de l’Arabie saoudite ou du Qatar ? Dans les colonnes des principaux journaux, intellectuels et journalistes nous expliquent que si les dirigeants des pays du Golfe ne veulent pas accueillir de réfugiés c’est parce que leur devoir premier est de protéger leurs peuples contre les potentiels vecteurs de déstabilisation. Pourquoi donc ces élites reconnaissent aux autres pays ce qu’ils refusent obstinément de s’appliquer au leur ?

 

Face aux difficultés financières françaises, il apparaît clair que tout effort en faveur des réfugiés se fera au détriment des nationaux et des étrangers résident légalement. Quel pays au monde promeut ainsi une préférence étrangère au détriment des intérêts de ses nationaux ? Il est d’ailleurs tout à fait stupéfiant que les élites françaises, promptes à comprendre, lorsqu’elles voyagent, la normalité d’un traitement des nationaux supérieur à celui des étrangers, contestent vigoureusement ce principe dès qu’il s’agit de l’appliquer en France.

 

En acceptant le diktat allemand, le gouvernement français a signé un compromis imbécile et nocif pour la France. Une alternative – et une seule – étaient ouverte :

 

  1. soit une politique d’extrême fermeté par laquelle la France aurait expliqué pourquoi elle ne pouvait plus accueillir qui que ce soit. Cette première possibilité se serait doublée d’une conférence internationale sur la Syrie dont la France aurait eu l’initiative avec, autour de la table, les principales puissances occidentales, la Russie et surtout l’Iran pour mettre définitivement fin à la guerre en Syrie et régler concomitamment le problème des migrants à la racine ;
  2. soit une politique à l’allemande où la France assumait totalement un accueil massif, conformément aux vœux du Medef qui milite pour des salaires à la baisse et la casse du droit du travail (cela peut choquer, mais au moins y a-t-il une logique). Nonobstant les problèmes majeurs d’intégration, cela aurait pu en effet relancer la compétitivité prix des produits français.

 

Au lieu de quoi, la solution pour le moins bâtarde qui a été choisie est la pire, faisant apparaître la France comme un pays à la fois faible, soumis aux exigences allemandes, et égoïste, refusant d’assumer son rôle d’étendard des droits de l’Homme dans le monde.

 

Enfin et alors que l’Allemagne, toujours pour ses seuls intérêts nationaux, vient d’annoncer la suspension de facto des accords de Schengen et le rétablissement de ses contrôles à ses frontières, la France apparaît politiquement dans une impasse. Soit elle annonce la même chose ce qui signera au grand jour la disparition totale et définitive de la souveraineté française en matière de politique étrangère, soit elle maintiendra le cap des intérêts allemands antérieurs et ce sera le comble d’un absurde qui achèvera le peu de crédit dont dispose encore le gouvernement.

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S
Reste que l'Allemagne est aujourd'hui beaucoup plus puissante et performante que la France. Ce n'était pas le cas il y a 20 ans. C'est très gentil de la critiquer mais cela ne fait pas avancer les choses. Une remise en cause est indispensable en France. La culture de la qualité et de l'organisation rapporte, l'Allemagne en est la preuve. Ainsi que le refus du jacobinisme imbécile et stérilisant.
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J
Je ne critique l'Allemagne que pour ses velléités d'imposer à l'ensemble de l'Europe ses propres intérêts nationaux en les présentant systématiquement comme des intérêts européens... Pour le reste l'Allemagne poursuit ses intérêts nationaux en se moquant des autres pays comme d'une guigne, sous un fatras discursif sur la "solidarité européenne". L'UE si elle a réussi à anéantir les souverainetés nationales, n'a en rien affecté la souveraineté allemande. En ce sens la France devrait être européenne comme l'Allemagne plutôt que de se suicider pour des projets supranationaux qu'elle est seule à poursuivre de manière aussi idéologique...